Ce premier article du site CSV-News illustre à merveille le Faire Ensemble de la CSV. Nous sommes au cœur d’une Recherche-Action participative. Vos commentaires, remarques et propositions sont donc les bienvenues. Et, nous vous en remercions par avance.
Article modifié le 22/02/2024
Chaque hiver, au sujet de la neige et des avalanches, une question majeure se pose à chaque skieurs de randonnée qu’il soit leader d’un groupe ou simple participant.
« Comment y voir plus clair dans ce monde de la nivologie, qui semble si compliqué ? »
Comment utiliser, concrètement, cette multitude d’outils, de méthodes ou de démarches proposées au fil des ans ?
Depuis Werner Munter, le 3×3 et les méthodes de réduction, beaucoup d’outils, d’aides à la décision sont apparus. Mais, comment choisir parmi toutes ses propositions, réflexions ou connaissances ?
« Métamorphoses, plaque friable, strates fragiles, déclenchement à distances, 3×3, BERA, méthodes de réduction quantitative, MRGraphique, Munter, Morel, Hanekan, Mac Cammon, Nivotest, Vigilance Encadrée, PFH, Faire ensemble, biais cognitif, Cartographie Systémiques des Vigilances, Briefing, OPERER, Démarche CSV,, GuidOSS, Skitourenguru, White Risque, Yéti, Cristal, ROMAN’sns, Synthesis, plateforme Regobs, Winter Journal, méthode DCMR… »
- Voici un premier article sur ce sujet de la classification des outil de nivologie par Baptiste Gil, sur le site de Montagnes Magazine…. ( en Janvier 2024 )
- Une ITW de Seb Escande, avec le 3X3 et d’autres sujets ( en Janvier 2022 )
- Et un article sur démarche globale et prise de décision ( en Avril 2020 )
Connaissances, Compétences, Outils, Méthodes, Démarches ?
Il est utile de préciser qu’il n’y a pas de compétences sans connaissances et que le pré-requis à une utilisation de ces outils de nivologie est une connaissance de base de la neige (Métamorphoses, SAT, Avalanches de plaque, strates fragiles, déclenchement à distances…)
De quoi parle-t-on vraiment dans cet article ?
Pour permettre un véritable choix, il est nécessaire de comparer des outils de même nature et donc de faire un premier essai de classification. Voici cinq catégories, cinq tiroirs pour ranger correctement tous ces éléments de la nivologie dans notre boite à outils personnelle.
Il y a les outils :
- 1… De gestion globale de l’activité.
- 2… De l’information
- 3… De communication (avec aussi les check-lists)
- 4… D’aide à la décision
- 5… De débriefing et de capitalisation.
Une classification en cinq catégories
Les outils de gestion globale de l’activité
Les outils de gestion globale de l’activité . Il s’agit d’outils qui permettent d’avoir une vision globale de l’activité et ils me semblent indispensables à qui souhaite enseigner une activité hivernale.
Avec le 3×3 (en 1990) qui en est l’élément historique. Mais ce 3X3 mériterait d’être a minima amélioré et augmenté. On pourrait alors parler de 3×4 ou de 4×4 mais ces appellations ne sont pas très convaincantes tant cet outil est reconnu sous son nom initial.
- Voici un article sur son évolution : « Avec la CSV, du 3 x 3 a un 4 x 3 itératif » (en Février 2022)
La méthode des 3 filtres décisionnels est une adaptation du 3X3 où le facteur humain devient prioritaire (en 2006, SNGM).
La Démarche CSV, acronyme de Cartographie Systémique des Vigilances, est très récente (en 2020) et reprend les composantes du 3×3, en les organisant différemment et en y ajoutant la notion de débriefing et la capitalisation, mais surtout avec une démarche participative et un document concret de référence (« le gribouillon »). C’est un outil de structuration du contenu basé sur l’Humain et une démarche Qualité (avec la roue de Deming). Elle développe également une réflexion sur la dimension pédagogique de l’activité. Plus largement, la Carto des Vigilances trouve aussi sa place dans l’ensemble des activités montagne été comme hiver, dans la structuration des expéditions et dans toutes les pratiques où la question du risque en groupe se pose.
Les outils d’information
Les outils d’information sont beaucoup plus nombreux, avec deux composantes : les conditions et le terrain, pour reprendre les termes du 3X3.
On y retrouve bien évidemment le BERA et les outils créés pour en faciliter l’analyse comme EvalBERA de l’ANENA et la page « Evaluer le Danger Local » du Winter Journal. Cet outil, le dernier en date, nécessite un apprentissage important et il devrait certainement changer de structure pour s’adapter aux observations par les pratiquants, avec les données du BERA global.
Avec également Synthesis, un outil de synthèse regroupant plusieurs types d’information dont celles des observations de terrain ou numériques de Flowcap, intégré à Data-Avalanches qui est plutôt une base de données. Synthesis mériterait largement d’être mieux documenté par les pratiquants pour devenir un outil incontournable (À suivre donc…, mais c’est un sujet délicat).
La carte de l’IGN, sous sa forme papier, complétée par une carte des pentes numérique, et donc aussi toutes les applications de cartographie qui permettent de visualiser cette carte des pentes (IphiGéNie, Alpinequest, Fatmap ect…).
Les sites Internet (comme Camp2Camp ou Skitour.ch), les réseaux sociaux ou les topos, articles et reportages participent intensément à un partage de l’information, qui cette peut être questionné.
Les outils de communication
Les outils de communication comme « la météo intérieure » ou OPÉRER (ANENA) pour le briefing, dont chaque lettre correspond à un mot associé à une action menée en direction du groupe.
- O pour : Objectif/projet
- P pour : Plan (Où, quand,Comment)
- É pour : Etat (du groupe)
- R pour : Risque (avalanche, autres)
- É pour : Equipement
- R pour : Règles (de groupe)
MEFIAT proposé par l’ANENA, Damien Haxaire
- M pour : Meteoperso
- E pour : Etat mental
- F pour :Forme physique
- I pour : Inquiétudes,
- A pour : Attentes,
- T pour : Tonalité générale
SOCIAL proposée par le SLF (WSL Institut pour l’étude de la neige et des avalanches SLF) :
- S pour : Skills (compétences du groupe)
- O pour : Organisation
- C pour : Communication
- I pour : Identification ( attentes, alternatives)
- A pour : Anomalies (interactions ?)
- L pour : Leadership
TÉCAP (ENSA) est un outil de communication entre le leader et son groupe) :
- T pour : Timing
- E pour : Etat
- C pour : Conditions Nivo-météo.
- A pour : Adaptation
- P pour : Plaisir
APéRO (ANENA, Seb et Karen) est un outil de débriefing (à retrouver donc dans la dernière catégorie)
- A pour : Ambiance
- Pé pour : Pépite
- R pour : Rateau
- O pour Objectif, Observations.
Les outils d’aide à la décision
Les outils d’aide à la décision sont les plus nombreux et ont beaucoup évolué dans le temps. La date de mise en oeuvre de ces différents outils permet de mieux comprendre leurs évolutions respectives, dans une perspective d’amélioration continue. À noter, il est certainement nécessaire de classer les méthode algorithmique dans un chapitre différents des autres outils d’aide à la décision.
On retrouve toutes les méthodes de réduction développées par Munter (en 1992) et encore bien présentes en Suisse. De la plus rudimentaire, la MRG (Méthode de Réduction Graphique, en 2002), à la plus complexe, la MRQ pour Méthode de Réduction Qualitative (en 2018).
Issu d’une réflexion sur le quanting, le Nivotest (en 1999 puis 2012) de Robert Bolognesi est particulièrement simple d’utilisation, il est souvent utilisé dans les formations Neige & Avalanches.
La Vigilance Encadrée (en 2009) d’Alain Duclos, rebaptisée Cristal propose 6 critères observables et 4 modes de vigilance, avec une présentation complète sur le site de Data-Avalanche et un programme de recherche en collaboration avec LISTIC-USMB. Historiquement, elle est issue de la méthode des indices évidents de Mac Cammon (en 2000).
Skitourenguru, une aide à la décision algorithmique, a trouvé une place importante en Suisse et auprès du CAS et du club alpin autrichien. Cette application soutenue par la Fondation Petzl concerne également une grande partie des Alpes françaises avec 3100 itinéraires analysés et classés chaque jour de l’hiver, . Skitourenguru fonctionne avec la MRQ.
YETI également soutenus par la Fondation Petzl propose de visualiser les zones à risque sur une interface cartographique (la carte IGN au 1/25 000). Yéti utilise les méthodes de réduction classiques : MRD (débutant), MRE (élémentaire) et MRP (professionnelle) croisée avec les données du bulletin d’avalanche.
Plus récemment (en 2018), la méthode Danger/Conséquences/Mesures/Risques (DCMR), nous vient des guides allemands (Chris Chemel et Ben Reuter) avec un petit livret pratique, le Winter Journal. Très visible sur le site d’Ortovox, avec des vidéos bien documentées et spectaculaires, DCMR devrait s’imposer en France car sa forme et les questions posées sur le Danger et les Conséquences sont très claires. Son cheminement de pensée est également très concret.
Guidoss (en 2019) a été conçu initialement comme un outil d’enseignement dans le cadre de l’ENSA, il permet de questionner le ressenti final d’une situation à risques.
D’autres outils sont plus confidentiels ou tombés dans l’oubli, comme « Stop or Go » (en 1999), Snow Card” (en 2006), « To go or not to go “ (en 2018).
Une précision importante : LA CSV N’EST PAS UN OUTIL D’AIDE À LA DÉCISION ! Mais elle le devient en intégrant un ou plusieurs de ces outils d’aide à la décision (parfois en les combinant entre eux !).
Les outils d’analyse, de débriefing
Les outils d’analyse, de débriefing sont malheureusement quasi inexistants à part la Démarche CSV (la Cartographie Systémique des Vigilances) qui utilise le document réalisé lors de la préparation pour analyser cette préparation et les fonctionnements du groupe.
Ni le 3X3, ni les outils d’aide à la décision n’abordent ce sujet et, surtout, permettent de le construire.
L’outil de communication APéRO (ANENA)
A pour : Ambiance
Pé pour : Pépite (insister sur chacun la sienne et une seule)
R pour : Rateau (insister sur chacun le sien)
O pour Objectif, Observations.
Cette méthode Pépites-Rateaux complète d’autres méthodologies utilisées pour mener ce débriefing. La dimension de capitalisation est un élément du débriefing qui a été apporté par la CSV et qui semble capital pour construire des compétences solidement ancrées.
Pour aller plus loin…
L’étape suivante consisterait à comparer entre eux les différents outils d’une même catégorie et pour cela de définir les critères qui les différencient.
- Concrètement, il serait très intéressant de réaliser une analyse comparative entre Cristal et DCMR, en questionnant les usagers sur leurs pratiques d’utilisation. Mais aussi sur les fondements scientifiques ou statistiques de chaque outil. Ont-ils fait l’objet de publications pour être discutés et critiqués par la communauté en France et en dehors de nos frontières (ex lors du congrès de l’ISSW) ? Leur facilité de prise en main ?
Mais aussi :
- Comparer Skitourenguru avec Yeti serait également pertinent.
- Tout comme le 3X3 avec la Démarche CSV.
Pour ce comparatif entre les outils de gestion de l’activité, plusieurs critères permettraient d’éclairer cette réflexion, comme la dimension participative du fonctionnement du groupe, la réalisation d’un support concret de référence, la prise en compte d’autres dangers que la nivologie ou l’universalité de l’outil pour d’autres activités de montagne.
Puis, au final, ce sera à chaque leader et à chaque groupe de faire un choix argumenté en fonction de sa réalité, de ses compétences et de son projet de sortie en montagne.
Peut-être y aurons-nous gagné en compréhension de nos activités et en sérénité ?
Merci d’avance pour vos contributions…
Je vous propose un petit exercice…
En utilisant la matrice de la CSV, positionner les différents outils que vous avez utilisé durant votre précédente sortie hivernale.
Qu’en pensez-vous ?